abandoned, haikyo, japan, japanese, kanagawa, kanto, ruin, urban exploration, urbex, yokohama
Negishi Grandstand

Negishi Grandstand : Histoire et Barbelés (2/2)

Je passe doucement sous la caméra de surveillance, m’approche des barbelés… mon dieu, ça ne va pas être facile ! Je tente de me hisser vers le haut, mais ça ne fait que rapprocher ces foutus barbelés qui on dirait veulent me happer.

Nous voici de retour dans le Negishi Grandstand de Yokohama. Si vous avez manqué l’infiltration tout en couleur de ces tribunes abandonnées, allez lire l’article qui lui est consacré ! Nous aborderons maintenant son histoire accompagnée de son ambiance au naturel.

Afternoon at the Negishi

1866. On se trouve ici au milieu d’un quartier de Yokohama pas encore très résidentiel à l’époque. L’Empereur Meiji décide d’y construire un hippodrome : c’est l’architecte J.H Morgan qui est commissionné pour son élaboration. Cet hippodrome est ensuite fréquenté de nombreuses fois par l’Empereur Meiji et surtout par son successeur, l’Empereur Hirohito.

1923.  C’est le Grand Séisme de Kanto, qui démoli Tokyo, détruit Yokohama. Le building du Negishi est presque complètement intact, mis à part les tribunes en bois qui ont prit feu. Il est retapé à ce moment là, mais jamais retouché depuis.

Downstairs at the Negishi

1942. Le tournant majeur pour le Negishi Grandstand ne fut pas le séisme passé mais plutôt la Seconde Guerre Mondiale : les courses de chevaux deviennent interdites et l’armée Japonaise s’en sert alors d’imprimerie (notamment pour imprimer des faux billets !) et les étables servent de prison pour les prisonniers de guerre australiens. Plus tard, interviendra la capitulation du Japon…

Huge Bulb at the Negishi.

1945. Pendant l’occupation du Japon, le genéral McArthur découvre cette imprimerie. Il s’en sert alors pour imprimer 140,000 actes de capitulation redistribué à travers tout le Japon. Le Negishi, l’Internet de l’époque !

1947. L’armée américaine s’approprie de l’ensemble du complexe, y construit une zone résidentielle et se sert du Negishi Grandstand pour ses bureaux administratifs. Et un atelier photo ? (voir l’article précédent). Le quartier s’appelle pendant un court laps de temps “Area X” avant de devenir le “Negishi Heights”. On trouve quelques photos d’époque sur le site de Yohidevils.

Death at the Negishi

1983. Le territoire du “Negishi Heights” est finalement retourné au Japon. Le rez-de-chaussé du building est utilisé brièvement en tant que bowling avant d’être complètement vidé et abandonné. La zone de devant devient un parc public tandis-que la zone derrière est la base navale de Yokosuka. Le Negishi Grandstand restera probablement là encore très longtemps, dans le même état, la végétation le recouvrant chaque année un peu plus… et des petits malins abîmant les barbelés qui l’entourent…

Coldness at the Negishi

Le seul mystère qu’il reste au Negishi Granstand c’est son passé militaire et ses souterrains. À en croire un commentaire de Brian sur le site de Michael John Grist, le sous-sol est constellé de galleries dont une mène à une grande salle avec deux portes géantes de métal, bien-sûr fermées. Dans les autres, Brian a trouvé beaucoup d’arsenal militaire. Mais c’était il y a des dizaines d’années…

Faces at the Negishi

Bien-sûr, MJG est parti à l’aventure, et a tenté la visite de ces galleries qui, malheureusement, finissent toutes en cul-de-sac. Je ne suis pas allé vérifier moi-même (et je ne pense pas avoir plus de courage que MJG de toute façon) mais si il y a des aventuriers parmi vous, vous pouvez aller vérifier, je suis prêt à vous indiquer les entrées. Elles sont toutes autour du Negishi Grandstand.

Switch at the Negishi

Ils ont l’air très intéressants ces sous-sols, mais alors, ce toit ? On se rends au dernier étage des trois tours, mais l’accès au dehors est toujours bloqué par une grosse chaîne et un cadenas. Mon ninja a cependant un talent caché : c’est aussi un crocheteur ! Après une heure de bataille avec tous les cadenas, il y en a un qui lui résiste un peu moins que les autres : paf, l’écoutille est ouverte, on peut monter sur le pont ! Mais hors de question de le faire en plein jour, ça serait l’alarme immédiate.

The Room at the Negishi

Voilà une bonne longue matinée passées au Negishi Grandstand. Le bâtiment est grand mais pas assez pour justifier plus de 10 heures de photographie. Dans l’attente et l’ennui, le froid me pénètre peu à peu. J’essai de me rapprocher d’une fenêtre où le soleil tape, mais en vain. Je tente de jouer avec l’impression qu’il fait plus chaud à certains endroits que d’autres, une manière de se réchauffer par la force de l’esprit… je regarde ma montre sans arrêt… le temps s’est vraiment arrêté ! Quand pourra t-on enfin sortir ? J’entends toujours les voix, l’activité du dehors, et je commence vraiment à redouter notre départ ce soir…

Je vais tenter de vous faire expérimenter ces longues heures d’attentes avec les photos et cinemagraphs suivant.

Cinemagraph - The Negishi Fan

La salle au mono-fan…

Mono fan at the Negishi

L’attente…

Cinemagraph, Waiting for the Dusk

 Le moindre détail devient centre d’intérêt…

Fuses at the Negishi

Dans l’espoir de voir un fantôme…

Cinemagraph - The Negishi Ghost

Vers 18h30, le soleil part enfin de cacher. On va pouvoir aller profiter de la vue depuis le toit et ensuite repartir : l’excitation est à son comble ! C’est parti, rendez-vous directement au 8ème étage, en passant par le 7ème…

7th Floor Lift at the Negishi

… où l’on trouve une porte “DANGER HIGH VOLTAGE” qui donne directement sur la base militaire …

Danger High Voltage at the Negishi

… et nous y voilà. Pas grand chose à voir dans les petites tours, sauf les moteurs des ascenseurs, un étrange bocal tout vide, et… une svastika. Qu’est-ce qu’elle fait là ? Sûrement pas une svastika religieuse, même si pourtant elle n’est pas dans le bon sens pour les fachos. Elle pourrait dater de la Seconde Guerre Mondiale, quand les Japonais occupaient encore le bâtiment ?

The Lift Engine of the Negishi

On monte l’échelle…

Nous voici sur le toit du Negishi Grandstand ! Grande joie : il y a moins de monde autour, et la base militaire semble plus ou moins endormie. Au fur et à mesure que les minutes passent, on se sent plus à l’aise, et on regarde autour un peu plus librement. Il y a toujours des gens qui promènent leurs chiens où d’autres qui font leur jogging. Il faudra s’échapper entre deux. Ce n’est pas très encourageant alors on profite de la vue… pendant un long moment.

Night View Roof of the Negishi

Il y a une vue imprenable sur la Landmark Tower de Yokohama, et ses alentours. Génial ! J’adorerais me rendre à la Landmark Tower et faire la photo inverse. Plus tard, peut-être.

Yokohama Landmark Tower seen from the Negishi

Il faut partir. Le ninja s’occupe de tout bien refermer, le cadenas, et ensuite les portes d’accès… c’est comme si personne n’était venu. Quelle journée bizarre. Nous sommes maintenant dehors, tapis dans un enfoncement près d’une porte d’entrée, cachés. Là, de l’autre côté des barbelés, c’est la vie, la vrai. Il me tarde d’être dehors, et je me demande encore comment je vais sortir.

J’y vais en premier. Je passe doucement sous la caméra de surveillance, m’approche des barbelés… mon dieu, ça ne va pas être facile ! Je tente de me hisser vers le haut, mais ça ne fait que rapprocher ces foutus barbelés qui on dirait veulent me happer. Je saute, essaie d’attraper les barbelés sans me faire mordre, et je me hisse petit à petit, essayant d’atteindre des pieds le haut de la barrière. Il y a juste un espace entre la barrière et les barbelés et c’est le seul point de rappel sur lequel je pourrait donner l’impulsion nécessaire pour passer au dessus des barbelés. Doucement, je tente, mais shlak !  Je me fait niq&* la main bien comme il faut ! P$@*# ! C’est carrément impossible ! Et qu’est-ce que je fais avec ce sac sur le dos ? Le sang me monte à la tête, mon coeur bat à 100 à l’heure. Et là, je vois une vieille dame juste en face de moi, de l’autre côté, qui me regarde, l’air ahuri. Oui, je dois ressembler à un animal blessé et en furie… alors je reste là, à la regarder aussi pendant quelques secondes, et j’ai juste envie qu’elle m’aide. Qu’on me sorte de là ! Mais que pourrait-elle faire de toute façon ?

Elle est effrayée. Elle se retourne et marche aussi vite qu’elle le peut. J’espère qu’elle ne va pas aller au koban. Il vaut mieux se dépécher ! Aussitôt, sans aucune hésitation, je balance mon sac par dessus la barrière et j’escalade les barbelés comme je peux, à l’instinct. C’est impossible de faire ça correctement. Mon jean et mon blouson se prennent dedans, se déchirent, les plumes volent tout autour… je me retrouve une jambe prise dans les barbelés, l’autre libre… mais qu’est-ce que je fais là !?!? Pendu comme une bête !?!? Je me secoue afin de me libérer, le jean finit de se déchirer complètement, et je tombe sur le sol la tête en premier, protégé par mes mains. Bravo ! Quel résultat déplorable ! J’ai les mains, bras et jambes en sang, couvert des plumes du blouson et le jean en lambeaux !

Je retourne vite aider mon collègue qui attends avec tous ces sacs. Il me les envoi par dessus les barbelés, je les réceptionne tant bien que mal avec mes mains meurtris, et ensuite il escalade à son tour. Presque en toute simplicité… en tout cas sans se blesser… incroyable. J’aurais dû le laisser passer en premier, et aller chercher une échelle.

Negishi - Yokohama Matrix

On retourne à la voiture, et on se rends immédiatement dans une pharmacie locale. Je montre mes mains à la pharmacienne pour lui expliquer que je veux du désinfectant, sans oser lui montrer mes bras et mes jambes. Étonnée, elle me demande : “Mais qu’est-ce que vous avez fait ?!” – et je lui réponds simplement… que je réparais ma voiture ! Je repars ensuite du magasin avec la moitié de mon jean qui traîne par terre… sous les yeux éberlués de la dame ! Quelle victoire. À refaire ? Hors de question. Et demain, je vais refaire mes vaccins contre le tétanos. Sayonara, Negishi-san.

💕

Retrouvez mes produits exclusifs ci-dessous ! Rendez-vous sur mon Instagram pour plus de photos et des vidéos. Merci à vous !

Qui est Jordy Meow ?

Je suis Jordy Meow. Photographe le jour, développeur la nuit. Parfois le contraire.

Je vis au Japon et j’explore les lieux insolites, abandonnés, mais aussi les beaux paysages et petits villages.

Newsletter

Recevez un e-mail par mois (maxi) avec mes derniers articles et livres. C'est le seul moyen de m'aider. Merci de tout cœur ! 💕