C’est l’automne et mon cher ami Marutan veut prendre l’air. Je sélectionne donc un haikyo adapté : la centrale hydroélectrique abandonnée de Wagakawa dans la préfecture d’Iwate. Après des heures de conduite, je me gare. Devant une falaise, malaise ! Mais en bas, de l’autre côté…
Jordy : Euh, ça va Marutan ? T’as pas l’air bien, là…
Marutan : Heu… c’est à dire que si tu ne conduisais pas en buvant ton café d’une main et en checkant tes mails de l’autre, j’aurais peut-être moins de sueurs froides ! Maintenant, il s’agit de descendre à 20m en contrebas, alors qu’il n’y a aucun chemin visible…
Marutan s’improvise Indiana Jones et descends en rappel à l’aide des lianes mises à notre disposition. L’une se brise sous le coup de l’évidence et avec l’énergie du désespoir, il se rattrape de justesse aux branches. Ses mains sont déchirées. Nous nous retrouvons en bas, à la rivière. Le monstre humide et froid se dresse de l’autre côté.
L’eau est glacée, mouvementée, sa profondeur insondable. Bref, c’est mal barré. Nous longeons la rive afin de trouver un passage plus simple et c’est finalement ces cables qui la surplombent qui se proposent à nous. Très bien. La douleur qu’ils affligent à nos mains est insoutenable, mais nous n’avons pas le choix.
Heureusement, de l’autre côté, c’est la grande joie. Les feuilles rougissent à notre arrivée tandis que d’autres jaunissent sans logique aucune.
Nous nous frayons un passage à travers la petite jungle en direction du géant de bitume.
Jordy : Je voudrais en profiter pour t’introduire, en toute amitié bien-sûr. Bon, ça fait des siècles que tu vis en Japonie, tu fais du beau boulot, mais pourquoi personne ne te connaît ? Tu ne sais pas comment inonder les réseaux sociaux avec des photos de ta tête ? Il n’y a pas de honte, tu sais.
Marutan : C’est juste que je ne veux pas faire comme toi qui spamme comme un bot russe avec tes photos de bicoques déglinguées ! Mais en effet, ça fait quelques années que je traîne mes guêtres au Japon et malgré le temps, je ne m’en lasse pas. Pour revenir à ta pique sournoise, c’est faux. On m’arrête encore dans la rue pour me demander si c’est bien moi le Marutan de l’émission de français sur NHK (qui remonte à 2012). Il est vrai que je suis discret sur les réseaux sociaux, mais c’est juste parce que je prends le temps de préparer mon plan de conquête du monde…
Après s’être improvisé un chemin à coups de machette, nous voici enfin au pied de cette fameuse usine. Il est à peine 8h du matin (nous avons quitté Tokyo à 3h du matin, non sans mal) et la lumière d’automne est sublime. Nous n’avons aucune peine à entrer dans le bâtiment qui n’est ni fermé, ni gardé.
À l’intérieur, nous sommes interloqués par la beauté du lieu. L’immense salle dotée d’un plafond de 15 mètres est baignée d’une splendide lumière filtrée à travers de gigantesques fenêtres verticales. Une véritable cathédrale industrielle.
Hydro-machin, quézako ?
Alors, comment marchait-il, ce bouzin ? Nous partons de la fin, avec cette salle où se trouvait les transformateurs. Comme vous, nous n’y connaissons rien, et cherchons juste à comprendre le mystère des lieux.
Le coeur de la centrale se trémoussait ici. L’électricité était générée via des turbines disposées dans ces gros trous, leurs engrenages excités par des effluves… fluviales, glaciales !
Jordy (out of the blue) : Tu as une petite fille au Japon, conçue avec une Japonaise… mais est-ce que tu recommanderais cette configuration à n’importe qui ?
Marutan : Oh, le vaste sujet ! Je pourrais en parler pendant des heures, et d’ailleurs (attention, placement produit) j’en ai parlé pendant des pages et des pages dans ma série dessinée Un papa français au Japon publiée pendant près de 4 ans dans un magazine NHK. En tant que dessinateur, c’est une source d’inspiration constante. En tant qu’humain, c’est une source d’émerveillement inépuisable ! Pour répondre à ta question, je recommande bien sûr cette configuration, à commencer par toi, puisque tu remplis les critères de pré-sélection. Allez, au boulot ! Tu sais que c’est pas la gentille cigogne qui va t’apporter le bambin déjà pondu ! Et sinon, je déconseille cette aventure surtout aux cons qui ne méritent sûrement pas toute la joie que ça peut apporter, et c’est déconseillé également aux amateurs de grasse matinée.
D’au-dessus, nous voilà maintenant en-dessous. Une turbine se trouvait-là, et les canaux d’entrées / sorties se remarquent bien.
Nous décidons de remonter la tuyauterie. Il semblerait qu’elle soit bien plus large dans les hauteurs pour finir multipliée en plusieurs canaux, bien plus serrés, probablement pour accentuer la pression. C’est un bonheur de vagabonder dans les viscères de cette bête de métal.
Nous nous retrouvons nez à nez avec le Seigneur de Wagakawa. Il a une sacré barbichette, un vrai Japonais d’époque.
Tout en haut, nous trouvons une sorte de double canalisation dont le fonctionnement me dépasse. Peut-être le saurez-vous, ou le devinerez-vous ? Beaucoup d’explorateurs aiment se prendre en photo sur cette partie centrale. Personnellement, je trouve que c’est prétentieux et déplacé de mettre sa propre vie en jeu pour une selfie.
Retour en bas. Il y a un autre groupe d’explorateurs : un mec, deux filles. Le mec m’ignore d’abord complètement (typique), mais les deux filles viennent à ma rencontre (typique).Quand je dis typique, ce n’est pas que les filles sont intéressées. Elles sont simplement curieuses, comme n’importe qui ! Un mec Japonais a plutôt tendance à ignorer la situation, et d’autant plus si c’est un étranger. C’est un truc qui m’a toujours un peu turlupiné.
Elles me demandent alors si je suis… Jordy Meow. Des cris de jubilations s’en suivent, et je ne sais pas où me mettre. Courtoisement, nous nous serrons la main. Je me demande si elles célèbrent ma personne, mes photos, ou, en vérité, la performance de ma SEO ! Ohhhh, Jordy Meow, tu gères la SEO, mais tellement ! J’avoue être un peu mal à l’aise à chaque fois, mais touché.
SEO, quézako ? C’est le travail que vous effectuez sur un site Internet pour que celui-ci soit bien placé dans les résultats des moteurs de recherche. La version Japonaise de ce site est souvent en tête dans les résultats en ce qui concerne les ruines, d’où ce succès tout relatif. Si vous êtes curieux, allez découvrir ma SEO Checklist sur Meow Apps.
Après une séance photo de cette rencontre fortuite mais fortunée, nous décidons de continuer notre périple. Nous avons d’autres chats à fouetter… comme ceux de l’île aux chats ! Attendez-vous donc à les retrouver dans un article prochain.
Nous reviendrons à la vie de Marutan très prochainement, avec un autre voyage. Pas facile de poser des questions à cet olibrius, et le terrain dangereux n’était pas non plus l’idéal ! En attendant, si vous avez des idées sur ce lieu, des questions à Marutan et sa vie de papa (ou d’illustrateur) au Japon, les commentaires sont là pour ça.
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